Oléoduc Keystone : le lobby pétrolier arrose le Congrès américain
Le Keystone gate, comme on va bientôt le surnommer, n'a pas fini de faire des vagues aux Etats-Unis. Ce projet d'oléoduc géant, qui permettrait d'acheminer chaque semaine des millions de barils de pétrole issu des sables bitumineux du Canada vers le golfe du Mexique, était déjà sous le feu des critiques après lesaccusations de conflits d'intérêts à l'encontre de l'opérateur TransCanada et de la Maison Blanche, censée valider le projet.
Mercredi 11 janvier, c'est une autre révélation qui a ébranlé le futur Keystone XL : une étude a dévoilé l'étendue des fonds versés aux membres du Congrès par l'industrie pétrolière et gazière pour s'attribuer leur soutien. Une force de frappe susceptible de faire plier Barack Obama dans sa décision, qu'il doit rendre avant le 21 février, alors qu'il cherche tous les appuis possibles avant l'élection présidentielle de novembre.
A l'origine de l'enquête, Maplight, un groupe de recherche indépendant américain, qui traque les transferts de fonds en politique, s'est concentré sur les dons financiers du secteur pétrolier et gazier à des membres de la Chambre des représentants. Car la chambre basse est à l'origine de l'adoption d'un projet de loi, en juillet, pour forcer Obama à accélérer l'approbation du projet Keystone. Le texte avait finalement été rejeté, faute d'un accord du Sénat, mais les parlementaires, en particulier républicains, avaient continué à faire pression sur le président américain pour qu'il donne son accord à ce projet industriel fortement décrié pour ses conséquences environnementales désastreuses.
Le résultat de l'étude est édifiant : seulement 2 des 118 membres de la Chambre des représentants qui listent des entreprises pétrolières et gazières parmi leurs dix premiers donateurs de campagne se sont opposés au projet de loi visant à accélérer la validation de l'oléoduc. Et en élargissant aux 195 représentants qui indiquent l'industrie pétrolière dans leurs 20 premiers contributeurs, les proportions ne diffèrent guère : seuls dix d'entre eux ont voté contre le texte.
Au total, ce sont pas moins de 12 millions de dollars qui ont été versés directement aux membres de la Chambre entre 2009 et 2011, soit juste après la décision de lancer le projet du Keystone XL, en 2008.
Le Guardian s'est amusé à comparer la liste des 17 représentants les plus arrosés (plus de 100 000 dollars reçus en deux ans pour chacun d'entre eux) et leurs positions sur le projet Keystone XL. Tous sont républicains et tous ont voté en faveur du texte de loi visant à accélérer la validation de l'oléoduc.
En tête, on trouve Steven Pearce, représentant du Nouveau-Mexique, qui a touché le gros lot avec 370 000 dollars de contributions directes reçues entre juillet 2009 et juillet 2011. "Il est temps de mettre les enjeux politiques de côté, avait-il déclaré sur son site Internet le mois dernier. Nous devons tous travailler ensemble pour veiller à l'aboutissement de projets tels que l'oléoduc Keystone." Arrive ensuite Mike Pompeo, représentant du Kansas, avec 333 000 dollars, puis Bill Flores, représentant du Texas, avec 266 000 dollars, qui estimait en juillet, lors de l'examen du projet de loi : "Si nous ne nous emparons pas de cette ressource précieuse, les Chinois ou d'autres pays le feront."
Audrey Garric
Photo : MARK RALSTON / AFP
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