vendredi 23 novembre 2012

Réaction du Comité pour l'environnement de Dunham (CEDunham) sur des oublis de Radio-Canada


Pipeline et pétrole des sables bitumineux 

     Le bulletin de nouvelles de Radio-Canada, mercredi soir le 14 novembre, a fait état des 
projets des compagnies pétrolières de transporter le pétrole des sables bitumineux de 
l’Alberta dans l’est du Canada à travers les pipelines existants. On a insisté sur la création 
d’emplois, l’autosuffisance énergétique du Canada, le coût de revient moindre comparé au 
pétrole qui arrive par l’Atlantique. Toutes choses valables. Malheureusement, on a émis 
bien des demi-vérités. 

     1- On a insisté sur le transport du pétrole jusqu’à Montréal. Or le projet consiste surtout 
à dépasser Montréal pour transporter le pétrole jusqu’à Portland dans le Maine, sans 
avantages pour le Québec. En effet, la quantité de pétrole que l’on veut transporter est bien 
supérieure aux besoins du Québec, encore plus supérieure à ce que la raffinerie de 
Montréal-Est (même rénovée) est capable de raffiner. La Compagnie pétrolière a déjà 
présenté un projet d’inversion du flot de Montréal à Portland, il y a 4 ans : projet jamais 
retiré. L’actualisation n’en est que reportée, la compagnie procédant par section… pour ne 
pas alarmer la population! À Portland, les installations portuaires se préparent déjà à 
recevoir le pétrole des sables bitumineux afin de l'exporter vers la côte est américaine, le 
Texas ou outre-mer. De son côté, la Colombie-Britannique s’oppose justement à la 
construction d’un pipeline qui traverserait la province si celle-ci ne reçoit pas sa juste part 
de bénéfices économiques et fiscaux. 

     2- On n’a pas parlé de sécurité ni de protection environnementale. Or le projet de 
transport du pétrole de l’Alberta est risqué, très risqué. Les tuyaux existants entre Westover 
et Montréal sont vieux de 39 ans, mais ceux de Montréal à Mansonville (Québec) et 
Portland (E-U) ont 62 ans. À titre d’exemple, la compagnie St-Laurent qui construit un 
pipeline de Lévis à Montréal a affirmé en Commission parlementaire que la durée de vie 
d’un pipeline, construit avec les matériaux d’aujourd’hui, est de 60 ans. Dans d'autres  
projets, au début des années 2000, dans le Sud-ouest asiatique, certaines compagnies 
projettent une vie de 40 ans. De plus, il y a déjà eu des fuites sur les tuyaux en question : 
plusieurs fuites mineures à divers endroits ; fuite importante à St-Césaire en 1950 et 1999; 
fuite entre Sutton et Glen Sutton détectée par un citoyen qui a averti lui-même la 
compagnie, laquelle a changé près de 10 km de tuyau. 
Il faut savoir que le pétrole des sables bitumineux est plus corrosif et explosif que le pétrole brut conventionnel. 
Ce pétrole contient encore du sable qui agit comme un papier sablé sur l’intérieur des tuyaux. Pour 
pouvoir le transporter, on y ajoute 30 % de diluant, diluant précisément plus explosif et 
abrasif. Et advenant une fuite, même s’il n’y a ni explosion ni feu, ce diluant s’évapore et il 
reste un pétrole visqueux presque impossible à ramasser. Le désastre survenu dans la rivière 
Kalamazoo, au sud du lac Michigan, en juillet 2010, provenait précisément du pétrole des 
sables bitumineux de l’Alberta : le nettoyage n’est pas encore terminé. Enfin, le 
changement de direction du flot dans les tuyaux augmente les risques, notamment à cause 
de la turbulence occasionnée dans les tuyaux, surtout dans les coudes du pipeline. 

     3- Le pétrole des sables bitumineux revient moins cher que le pétrole importé. Mais 
comme on l’a évoqué dans l’émission, il est loin d’être certain que le profit ira aux usagers 
plutôt qu’aux compagnies elles-mêmes. Lorsque l’exportation de pétrole de l’Alberta «sera 
désengorgée», comme on a dit à l’émission, le prix s’ajustera au prix mondial. Mais surtout, 
ce coût actuel est moindre parce que la compagnie en Alberta ne se soucie pratiquement pas 
des effets sur l’environnement et la santé des personnes vivant dans la région. Un 
documentaire sur la pollution des eaux et les effets néfastes sur la santé des autochtones en 
fait foi. Et pourtant, la compagnie pourrait exploiter de manière moins polluante.  

     4- Enfin, on a ridiculisé le gouvernement du Québec qui veut faire faire une étude 
d’impact indépendante sur les risques pour le Québec. Or il relève de la responsabilité du 
gouvernement de se préoccuper de la protection de l’environnement sur son territoire. 
Depuis 4 ans, plusieurs organismes du milieu demandent une telle étude. Le comité pour 
l’environnement de Dunham a déjà fait parvenir une pétition de 3500 signatures à cet effet. 
La plupart des 15 municipalités situées entre Montréal et Mansonville ont passé des 
résolutions demandant la même chose au Gouvernement. Il y a un problème de juridiction, 
rétorque-t-on! Ce n’est pas une raison de ne rien faire, d’autant plus qu’il existe un accord 
entre les deux gouvernements à l’effet de mener de telles études en commun. On ne peut 
accepter que le Fédéral soit seul responsable des règles de sécurité et que le Québec assume 
tous les inconvénients s’il survient un désastre. Principe de précaution oblige. Il est plus 
que temps que Québec prenne ses responsabilités. 

Jean Binette et Guy Durand 
Comité pour l’environnement de Dunham 

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